mercredi 22 mai 2013

6 mois... et encore plus vivante !

Gare de taxi-brousse Nord de Tana, 17h
Même lieu, même heure. 6 mois en arrière
J'arrivais, c'était le début d'une aventure dont j'étais loin d'imaginer tous les bouleversements qu'elle allait provoquer en moi. Je partais à Tsarahasina me présenter au Père Bertrand avant de rejoindre mon lieu de mission.
Le moment d'une petite pause pour prendre conscience du chemin parcouru depuis ce jour là est maintenant venu.

Madagascar, la vie de coopérant, le travail d'un architecte sur un chantier. Je ne connaissais rien de tout ça. Saut dans le vide, oui, mais confiance absolue. Dieu est toujours là. 
Et Il a été là.

On se fait une idée par ce que d'autres on vécu de ce que sera notre mission. En réalité, notre mission nous appartient et c'est nous qui choisissons d'en faire ce que l'on veut. Peut-être en est-il de même pour la vie ? Quelques balises sont posées, ça et là, à nous de les voir et de s'en saisir...

Que s'est-il passé en 6 mois pour que je me sente tellement changée ?

Des découvertes
Celle d'une langue bien différente de la notre, le malgache. Mais aussi celle de la langue universelle, celle qui dépasse les mots, celle qui se parle avec le regard, les gestes, les attentions et qui en dit souvent bien plus.
Celle de l'Eglise malgache, très jeune, qui penne à faire entendre son message au milieu d'une culture tournée vers le passé et vers les morts.
Celle de modes de vie différents qui nous obligent à remettre en question le nôtre.
Celle d'un pays aux paysages aussi variés que magnifiques. Une nature à l'état pur à perte de vue. Une richesse dont ils n'ont malheureusement pas conscience...

Entre Antsirabe et Antananarivo


Des rencontres boulversantes
Celles des Pères missionnaires MEP qui quittent tous leurs repères familiaux, amicaux, culturels et bien d'autres pour annoncer leur foi. La force et la pérennité de leur action réside dans la conviction que, si l'homme a découvert le message de l'Evangile, il devient capable de "se mettre debout" et de devenir lui-même acteur des on développement.
Celle de 4 enfants, entre 4 et 8 ans qui ont quittés leurs parents pendant 1 an pour se faire opérer et rééduquéerdans un centre de soin dans le sud de l'île, sans pleurs, et avec un courage qui laisse perplexe.
Celle de lycéens qui choisissent eux aussi de quitter leurs parents pendant 1 an pour venir étudier au petit séminaire, animés par l'envie d'apprendre et le désir de s'engager dans l'Eglise.
Celle de ceux qui n'ont rien. Les enfants de l'orphelinat, les chauffeurs, Fano et Lala, le secrétaire, Monsieur Daniel, les Sœurs Servantes, Soeur Antoinine et Soeur Marceline. Ceux sont eux les premiers qui m'ont accueillis.
Celle des enfants, toujours joyeux. Rien ne semble atteindre leur joie de vivre... L'avenir du pays se joue avec eux...
et bien d'autres...
Entre Marovoay et Ambondromanesy


Des joies
Celle de vivre au contact des malgaches et de me sentir de plus en plus proche d'eux. Non pas que je devienne malgache, non pas qu'ils deviennent français, mais plutôt que nous arrivons à faire tomber les barrières, les unes après les autres pour se rejoindre et essayer de se comprendre.

Au bord du fleuve Mananjary

Des incompréhensions et des questionnements
D'où viens cette capacité à accepter la douleur ?
Pourquoi ne se projettent-ils pas dans l'avenir ?
Pourquoi ne savent-ils pas dire non ?
Pourquoi sont-ils incapables de gérer de l'argent ?
Pourquoi ne se sentent-ils pas plus responsable de leur avenir ?
Au final, pourquoi le poids de leur culture les empêche d'avancer sereinement ?

Entre Marovoay et Ambondromanesy

Des surprises
Celle de voir qu'avec un tout petit rien ils arrivent à tout. Une capacité d'adaptation étonnante et pleine de créativité. Il n'y a pas de problèmes mais que des solutions.
Celle d'un rythme de vie beaucoup plus respectueux de ce que nous sommes... A chaque jour suffit sa peine...

Au bord du fleuve Mananjary


Des confrontations et des bouleversements
Non, le monde n'est pas comme je me l'imaginais. Notre éducation et notre société forment un cadre qui se veut rassurant et protecteur. Mais le monde est fait de bien d'autres réalités qui nous échappent et nous dépassent. Cette confrontation est parfois douloureuse car elle nous oblige à sortir de nos petites illusions. Elle est aussi bouleversante car elle nous oblige à envisager ce qui nous semblait impossible jusque là... Enfin, elle est joie car ancrée plus profondément dans la vérité et dans la réalité.

Homme concassant la pierre pour la transformer en gravillons

Des indignations
Devant la violence. Inouïe, scandaleuse, inacceptable. La vie et la mort n'ont pas le même sens pour eux. Il ne s'agit que d'un passage sur terre.
Devant le tourisme sexuel. Sans aucune gêne, ouvertement. On les appelle les VVV (Vieux Vazaha Vicieux). Ils viennent ici profiter d'une retraite "heureuse" au soleil, bien arrosée et en bonne compagnie.


Et au final, un enracinement plus profond dans la foi, celle qui nous rassemble malgré nos différences.

4 commentaires:

  1. Merci pour cet article !
    Je commençais à trouver le temps long depuis le dernier article !
    ça donne envie de venir te voir !! Dans six mois ?
    Plein de bisous
    Amélie, Paul et Clothilde

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  2. " Non, le monde n'est pas comme je me l'imaginais. Notre éducation et notre société forment un cadre qui se veut rassurant et protecteur. Mais le monde est fait de bien d'autres réalités qui nous échappent et nous dépassent. Cette confrontation est parfois douloureuse car elle nous oblige à sortir de nos petites illusions. Elle est aussi bouleversante car elle nous oblige à envisager ce qui nous semblait impossible jusque là... Enfin, elle est joie car ancrée plus profondément dans la vérité et dans la réalité. "

    C'est très bien dit !! :)

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  3. "En réalité, notre mission nous appartient et c'est nous qui choisissons d'en faire ce que l'on veut. Peut-être en est-il de même pour la vie ? Quelques balises sont posées, ça et là, à nous de les voir et de s'en saisir..."
    C'est si vrai. A nous de faire les bons choix et d'emprunter les bons chemins. Un travail de tous les jours.

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  4. Une plume qui remet bien des pendules à l'heure;
    Merci pour cette touche de fraicheur!

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