Bienvenu à Antanimalandy (nom du quartier dans lequel se situe le chantier) !
C'est par là qu'on rentre sur le chantier...! |
Mais commençons pas une courte
présentation du projet avant de présenter mon travail (ou en
tout cas ce que j’en comprends pour l’instant !).
L’hôpital sera composé d’un ensemble
de 8 bâtiments variants de 120 m² à 3600 m². Il s’agit d’un bâtiment pour les
urgences et les consultations, un hôpital (avec 150 lits), un bâtiment pour
accueillir les familles des malades, un bâtiment pour loger le personnel
médical, un bâtiment pour accueillir la mission (religieuses qui s’occuperont
de la gestion de l’hôpital), une église et quelques bâtiments annexes. Bref, vous l’aurez compris, il y a du travail
en perspective… puisque nous en sommes actuellement aux fondations du premier
bâtiment !
Jusqu'à maintenant, je venais sur le
chantier surtout en observation parce que le Père Bruno était encore là et qu’il
était l’interlocuteur unique de Dody, le chef du chantier. Je communiquais
plutôt avec Tsiry, l’ingénieur (!) qui parle français. Mais le Père Bruno
est parti chercher des fonds en Italie et Tsiry est rentré à Tana pour se faire
soigner… Donc je me retrouve maintenant toute seule en face de Dody !
Quand on entre par l'entrée principale |
La feuille de route est tracée,
et même s’il n’existe pas de planification des tâches comme on l’entend chez
nous, il n’y a pas de temps à perdre. Et les ouvriers l’ont aussi compris
puisqu’en ce moment, ils mettent les bouchées doubles ! Et ils ont opté
pour une stratégie payante : se diviser pour mieux régner (malheureusement,
je suis toute seule donc je ne peux pas en faire autant !). Ils sont 34 et cette semaine ils se sont séparés
en 3 équipes pour lancer trois travaux différents : la construction d’une
sorte de puits pour faire s’évacuer les eaux de pluies qui ruissellent dans
toute la parcelle (c’est devenu urgent parce que la saison des pluies a
commencé et que les quantités d’eau qui tombent sont phénoménales !), la
construction d’un beau mur en pierre sur toute la limite Est de la parcelle,
celle où se situera l’entrée principale, et enfin, la fabrication des
ferraillages pour les fondations en béton du premier bâtiment. Plus les petits
travaux annexes comme la fabrication de la buse pour l’évacuation, la finition
des « chapeaux » sur le mur d’enceinte… Ça aurait été plus pratique
avec deux yeux en plus derrière la tête !
Mur d'enceinte au Nord-Est de la parcelle |
Les ouvriers coupent les fers puis les plient pour former des "rectangles" selon les dimensions des semelles et des longrines. |
Il s’agit donc pour moi d’anticiper
leur travail en préparant des dessins à une plus petite échelle que ceux déjà existants.
Roberto, l’architecte italien qui a dessiné le projet, a déterminé les grandes
lignes de la construction et il faut maintenant réfléchir plus précisément à la
mise en œuvre des matériaux, aux dimensionnements des éléments et à l’ordre de
réalisation des différents travaux.
Pour l’instant je n’ai pas encore
beaucoup anticipé donc nous faisons la course ensemble avec les ouvriers, alors
que je devrais la faire devant eux. J’ai donc percé mes nuits cette semaine
pour produire les dessins dont ils avaient besoin le lendemain ! sic !
C’est le plus court délai entre la conception et la réalisation que j’ai vu jusque-là !
Oui, d'accord, j'ai des progrès à faire...! |
Celui-là était plus simple...! |
Je vais donc sur le chantier tous
les jours, à 7h. Mon rôle est un peu ingrat puisque je viens pour contrôler la
bonne exécution de ce que j’ai dessiné. Je me balade donc avec mon mètre et gare
aux centimètres en trop ou en moins ! Toutes nos conversations sont
ponctuées de « Mety ? Mety !» (Ca convient ? Ca va !) ou
de « Mety ? Tsy mety ! » (Ca conviens ? Non ce n’est
pas bon !). Et évidemment, ça n’a
pas loupé ! Les erreurs ont déjà commencées ! Pas toujours facile,
alors que je suis une fille (et qu’ils sont 30 gars !), et que je parle
français (et qu’ils parlent malgache !), et que je n’ai pas d’expérience
(et que ça fait 15 ans que le chef travaille avec le Père Bruno pour toutes ses
constructions !), d’avoir de la crédibilité !
Donc j’ai opté pour une
intensification de l’apprentissage du malgache et un déploiement d’énergie et
de précision au niveau des dessins, moyen de communication qui me paraît le
plus fiable pour l’instant.
La première étape consiste à me
faire accepter, ensuite il faut que je me fasse comprendre, et encore ensuite
il faut que je me fasse entendre.
« Me faire accepter »…
L’erreur du début a été de ne pas
me présenter devant tout le monde à mon arrivée. Ça aurait facilité mon
intégration.
J’ai donc profité des derniers
jours de soleil pour tirer le portrait de mes 34 gugus en leur demandant à
chacun leur prénoms. Et j’ai réalisé un trombinoscope trop classe pour essayer
de mémoriser leurs prénoms. « Work
in progress !»… et ça va me demander encore de la persévérance ! Mais leurs sourires quand ils entendent leur
nom lors de mon bonjour matinal me montrent déjà que je suis sur la bonne voie.
« Me faire comprendre »…
Je crois que je me souviendrais
longtemps du regard de Dody quand je lui ai présenté mes premiers dessins pour
le puits d’évacuation de l’eau. Il y a eu un grand silence, puis ces yeux se
sont promenés sur toute la surface de la feuille (des feuilles plutôt !),
et enfin il m’a regardé en me disant « Mazava », « Je comprends !».
Et moi j’ai compris qu’il n’avait pas dû voir beaucoup de dessins avant le mien !
Evidemment, il est crucial que j’acquière
rapidement un minimum de vocabulaire (hauteur, largeur et profondeur sont en
haut de la liste !) pour faciliter la compréhension.
Sœur Stéphane, notre prof de
malgache, m’a accompagné vendredi matin sur le chantier. Elle m’a dit qu’ils me
comprenaient et qu’il ne restait plus qu’à mettre les mots de la phrase dans le
bon ordre ! Je tiens le bon bout !
Pour ce qui est de les
comprendre, je panique encore quand les phrases sont trop longues et quand leur
accent est trop différent de celui d’ici ! « Work in progress !»…
« Me faire entendre »…
C’est une chose de faire des
dessins et c’est une chose de les expliquer… mais s’en est une autre qu’ils les
réalisent J !
Il n’y a que Dody qui regard les dessins. Avec tous les autres, la transmission
se fait oralement, par lui. Donc c’est normal que certains détails passent à la
trappe parce qu’ils n’ont jamais vu ce à quoi ils devaient aboutir. Donc pour
moi, il s’agit de dessiner avec des dimensions rondes ((plus faciles à
mémoriser !) (Éviter le « 3,19m » de profondeur pour le puits
par exemple !) (J’étais rouge de honte de mon erreur à chaque fois qu’il rappelait
aux gars la mesure !)), essayer de simplifier au maximum les divisions et
les subdivisions, et surtout ne pas oublier TOUTES les côtes sur les dessins
parce qu’ils ne font pas les additions… !
Et ensuite, commencer à discuter
des modes de réalisation… Roberto a son idée, Dody a la sienne et entre les
deux, mon cœur balance !
Ils sont pour l'instant très appliqués. |
Roberto joue un rôle important
dans tout ça puisque nous nous échangeons plusieurs mails par jour, dès que je
suis rentrée à l’évêché en fin de matinée. Je lui envoie mes propositions dessins
sur la manière dont j’envisage tel détail et il les corrige avec des
commentaires jusqu’à ce que j’ai tout compris (ce qui peut parfois donner lieu
à plusieurs échanges avant d’arriver au dessin final !).
A bientôt pour la prochaine visite !
Au revoir ! |
Tu es à la meilleure école qui soit : l'école sur le terrain ! Profites-en bien !
RépondreSupprimerC'est avec une grande admiration que je viens de découvrir ton blog ! Que de chemins parcourus depuis notre rencontre.
RépondreSupprimerC'est un magnifique projet que tu mènes et tu peux en être fière. Je crois que je suis bien placée pour te dire combien un hôpital est utile :)
Je te souhaite une magnifique aventure, des belles rencontres et surtout une extraordinaire "redécouverte" de soi !!!
A bientôt sur ton blog :)
Bisou
Claire
Trop bien l'idée du trombinoscope!
RépondreSupprimerIl n'est pas dit que Dédé va baisser les bras aux premières difficultés!!!
ça c'est sûr, tu es à la meilleure école qui soit!